Il y a 40 ans, le 9 novembre, le général de Gaulle décèdait dans sa résidence de Colombey-les-Deux-Eglises (Haute-Marne). Sa disparition est l’objet de commémorations en France, mais elle donne également lieu à des cérémonies d’hommage d’anciens combattants en Afrique. La figure du général est en effet restée très populaire en dépit des ambigüités qui entourèrent les négociations des indépendances africaines.
«C’est la petite-fille du général de Gaulle !». La présentation fait mouche sur les anciens combattants africains de la Seconde Guerre mondiale, et même chez les combattants qui s’engagèrent un peu plus tard. Anne de Laroullière fait partie de la délégation de la fondation qui porte le nom de son grand-père, et qui vient de faire une tournée au Tchad, Cameroun et Congo. À chaque poignée de mains entre l’héritière et les vieux soldats, l’émotion est présente. Un regard s’allume, une larme perle. Même effet pour le nom de Leclerc, lorsque le fils Charles du prestigieux maréchal salue les anciens de la France Libre. Les deux chefs militaires n’ont rien perdu de leur aura. Dans les coeurs, c’est évident, mais aussi dans les pierres. Il suffit de comptabiliser dans les villes africaines francophones, les établissements, les artères, les places, les stèles qui portent les noms des deux hommes, cinquante ans après les indépendances pour se faire une idée de cette popularité. Les nouveaux États de l’Afrique francophone des années 1960 n’ont pas débaptisé les rues comme leurs homologues anglophones et lusophones.
Un grand homme
«Le général marquait ne serait-ce que par sa stature» disent ceux qui l’ont cotoyé, en faisant allusion à sa taille (1m92 ou 93, selon les témoignages) inhabituelle, à l’époque. Sûr que l’homme au képi dépassait d’une bonne tête la foule dans laquelle il n’hésitait pas à se plonger. Mais la stature, c’est aussi celle du chef dont l’image apparaît dans les propos de ceux qui se souviennent du «Grand Charles». Un jeu de mots qui n’aurait pas déplu au général dont l’humour était plutôt caustique. «On savait qu’il ne fallait pas broncher quand il avait parlé même si on n’était pas d’accord» se souvient l’une des jeunes recrues de la France Libre qui servit comme garde de sécurité. «On se tenait à carreau devant lui. Il avait une voix qui forçait au garde-à-vous».
«De Gaulle, c’est comme un père» disent ces jeunes confrères journalistes camerounais qui ne l’ont certainement pas connu. «Il incarne la France» précisent-ils avant de se tourner vers les anciens combattants pour poursuivre d’improbables interviewes : «Papa, tu as connu le général de Gaulle, il était comment ?» Mais Paul Gwater, engagé en 1940, est bien trop ému par ses souvenirs pour répondre à une question aussi directe.
Des séjours «historiques» en Afrique
Quatre dates marquent les relations du général de Gaulle avec le continent africain.
Le 29 octobre 1940 lorsque le général organise la France Libre à partir de Brazzaville (avant de déplacer le siège en 1943 à Alger).
Le 30 janvier 1944. À quelques mois de la victoire des alliés, il réunit les gouverneurs de l’Afrique occidentale française, de l’Afrique équatoriale française et de Madagascar et il jette les bases des nouvelles relations entre la métropole et ses colonies, en annonçant : «il n’y aurait aucun progrès qui soit un progrès, si les hommes, sur leur terre natale, n’en profitaient pas moralement matériellement, s’ils ne pouvaient s’élever peu à peu jusqu’au niveau où ils seront capables de participer chez eux à la gestion de leurs propres affaires.»
Le 4 mars 1953. Alors que le général est écarté des affaires publiques françaises, il entreprend une tournée de près d’un mois sur le continent. Il visite le Sénégal, le Soudan français, Guinée, la Côte d’Ivoire, le Togo, le Dahomey, la Haute-Volta, le Niger, le Tchad, l’Oubangui-Chari, le Congo, le Gabon et le Cameroun. En automne de la même année, il revient au Tchad et au Congo et rajoute à sa visite Madagascar, La Réunion, les Comores et la Côte des Somalis. Partout, l’accueil est enthousiaste. Le général veut à la fois témoigner de sa reconnaissance aux populations qui ont participé à l’effort de guerre, et prendre le pouls des anciennes colonies en marche vers leur indépendance.
Le 21 août 1958, le général débute à Ndjamena une tournée africaine. Il est revenu au pouvoir en France depuis le mois de juin à l’occasion de la crise algérienne. Les grandes lignes de la création d’une Communauté française qui doit régir les rapports entre la République française et les Territoires d’Outre-mer sont déjà tracées et le projet doit être soumis au référendum en septembre. Le président du conseil, Charles de Gaulle vient promouvoir son idée de Communauté, où la France conserve les secteurs clés de décision (défense, politique étrangère, commerce extérieur et monnaie). Il se rend à Tananarive, Brazzaville, Abidjan, Conakry et Dakar. L’étape guinéenne sera l’occasion d’un discours violent -et désormais historique- de Ahmed Sékou Touré, rejettant la proposition française. L’accueil des Sénégalais, en dépit de l’avis favorable de Léopold Sédar Senghor, sera mitigé.
Nicolas Sarkozy rend hommage à Charles de Gaull: Il y a quarante ans, les derniers mots du général de Gaulle : « J’ai mal dans le dos…»
La fondation Charles de Gaulle rend hommage à l’Afrique combattante de la France libre